A. La question juive dans le monde capitaliste
Peuple commerçant dont la survivance au milieu d’autres peuples trouve sa racine dans une fonction sociale particulière, les juifs ont vu leur sort déterminé à travers les âges par l’évolution générale de la société, évolution qui changea leurs rapports avec les différentes classes. La révolution bourgeoise dans l’Europe occidentale ouvrit les portes des ghettos et intégra les masses juives dans la société environnante. L’assimilation des juifs sembla chose faite. Mais les pays d’Europe centrale et orientale, les plus vastes réservoirs des juifs cantonnés depuis des siècles dans des fonctions d’intermédiares, entrèrent dans la voie du développement capitaliste au moment où le capitalisme mondial était déjà entré dans sa phase impérialiste. Alors que les rapports d’échange et de production séculaires se virent brusquement bouleversés, enlevant aux juifs la base matérielle de leur existence, aucune industrialisation massive ne permit l’intégration dans le prolétariat de ces millions d’intermédiares devenus inutiles. La différenciation sociale des masses juives fut de ce fait entravée. Une petite partie des juifs seulement devint capitaliste ou prolétaire ; une partie plus importante emigra, contrecarrant ainsi la tendance à l’assimilation complète qui régnait dans les pays occidentaux. La grande majorité resta dans un état misérable de petits commerçants, « écrasés entre le féodalisme et le capitalisme, la putréfaction de l’un augmentant la putréfaction de l’autre » (A. Leon).
Les mouvements antisémites du passé possédèrent toujours une base sociale directe ou indirecte. Ce furent des mouvements de classes sociales diférentes, dont les intérêts entrèrent successivement en conflit avec la fonction sociale du juif. Il n’en est pas autrement du renouveau que connut l’antisémitisme vers le début du XXème siècle.
- Dans les pays arriérés d’Europe orientale, des forces politiques réactionnaires pouvaient réussir à détourner le mécontentement et le désespoir des masses vers des pogroms périodiques parceque la haine du petit peuple envers le petit usurier et prêteur à gage juif, envers le petit commerçant et le cabaretier juif était une réalité sociale indéniable.
- Dans les pays d’Europe centrale, les mouvements antisémites tels que celui du bourgmestre Lüeger à Vienne, trouvèrent leur racine sociale dans l’exacerbation de la concurrence à l’intérieur des classes moyennes, libérales et commerçantes, submergées par un flot d’immigrants juifs.
- En France, le mouvement antisémite qui se déclencha à l’occasion de l’affaire Dreyfus trouva son origine sociale dans la haine de l’aristocratie face aux banquiers juifs qui achetèrent leurs châteaux, et des fils d’aristocrates qui voyaient les carrières qui leur étaient autrefois « réservées », exclusivement occupées par ces dangereux concurrents.
Ces couches sociales réussirent à orienter contre les juifs, pour un certain temps, les sentiments nationalistes exacerbés d’une grande partie de la petite bourgeoisie.
Ayant leurs racines dans les conflits sociaux déterminés, ces différents mouvements antisémites apparurent, avec des manifestations fort diverses, allant des phénomènes de la plus pure barbarie (pogroms russes) à la formulation de théories nationalistes « raffinées » caractéristique pour l’époque impérialiste (Charles Maurras).
Les possibilités sociales de l’assimilation des juifs en Europe occidentale avaient créé un puissant mouvement idéologique vers l’assimilation totale. L’impossibilité d’une assimilation massive des juifs en Europe orientale provoqua un courant puissant favorable à une renaissance nationale et à une conservation des particularités nationales. C’est au milieu de fortes concentrations de masses populaires juives, en Pologne, en Lithuanie, en Russie occidentale, en Hongrie, en Roumanie, et en Slovaquie que se développa une nouvelle littérature en Yiddisch, un nouveau folklore, une intense vie culturelle et même politique autonome (le « Bund » dans le mouvement ouvrier). Dans la mesure où les masses juives émigrées aux Etats Unis s’y retrouvèrent socialement cantonnées dans des secteurs déterminés de la vie économique, et géographiquement concentrées, ce mouvement se prolongea jusque dans ces pays. Lénine qui, seul, sut appliquer dans la IIème Internationale une stratégie marxiste dans la question nationale, rejeta tout pédantisme dans son jugement de ce courant. Il partit du point de vue que la tâche du parti révolutionnaire consistait à intégrer dans le mouvement d’émancipation prolétarienne tous les courants d’autonomie culturelle et nationale correspondant à la véritable aspiration des masses laborieuses. C’est pourquoi il reconnut la légitimité, du point de vue socialiste, de ce mouvement juif autant que du mouvement polonais ou tchèque. La tâche des ouvriers juifs consistait à lutter à côté des travailleurs du pays dans lequel ils habitaient, pour le renversement du capitalisme, après quoi il leur serait laissé entière liberté d’adopter l’organisation de leur autonomie nationale et culturelle d’après leur choix.
L’époque du capitalisme décadent est en même temps l’époque de la crise aggravée du problème juif. L’inflation, la pression accentuée du capital bancaire, puis la grande crise économique, ruinent des millions de petits artisans et commerçants, et exacerbent à l’extrème la haine contre les concurrents juifs. Le chômage terrible qui sévit parmi les travailleurs intellectuels et la misère accrue des professions libérales en Europe centrale et orientale, créent un climat particulièrement favorable pour l’apparition de vastes mouvements petits-bourgeois de masse, trouvant dans l’anti-sémitisme une de leurs armes idéologiques propres. Dans les pays d’Europe orientale, ces mouvements traduisent un courant populaire extrèmement profond qui s’extériorise en de nombreuses explosions sanglantes. En Allemagne c’est le pouvoir d’Etat, tombé entre les mains des dirigeants nazis, qui a organisé d’en haut la persécution et plus tard l’extermination des juifs. En ce sens c’est le capitalisme décadent qui remit sciemment entre les mains d’une bande de criminels sanglants, (qui) est pleinement responsable du sort effroyable des masses juives en Europe durant la guerre. L’extermination des juifs européens par l’impérialisme allemand est un avertissement pour tous les autres peuples, leur montrant le sort qui les attend si la société actuelle continue à pourrir.
Le sionisme est né dans la petite bourgeoisie juive d’Europe centrale en réaction à la naissance de l’antisémitisme au début du XXème siècle. Mouvement typiquement petit-bourgeois, il est resté longtemps dépourvu de l’aide de la bourgeoisie juive et isolé des masses populaires. Au cours de la première guerre mondiale, l’impérialisme britannique voulant en faire un instrument pour s’installer en Palestine, sembla lui donner la possibilité de devenir une réalité par la déclaration Balfour. A partir de ce moment commencèrent à se déclarer un léger afflux de capitaux et un faible mouvement d’immigration. Ce n’est qu’après l’arrivée d’Hitler au pouvoir et la chute rapide dans l’abime de tout le judaisme européen, que ces deux mouvements s’"accélèrent" contrecarrés à la fois par des explosions nationalistes arabes et par la politique de l’impérialisme britannique, dressant de plus en plus des barrières à la pénétration juive en Palestine.
Pour le prolétariat révolutionnaire, le sionisme doit être considéré comme un mouvement à la fois utopique et reactionnaire :
- Utopique :
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- parce qu’il juge possible un développement « harmonieux » des forces productives dans une « économie fermée » en Palestine, au milieu d’un monde capitaliste sujet à des convulsions économiques de plus en plus grandes. Le formidable développement de l’économie palestinienne qui serait nécessaire pour permettre l’absorption de plusieurs millions d’immigrés est irréalisable dans le cadre de l’économie capitaliste mondiale actuelle.
- parce qu’il juge possible la création d’un état juif (ou bi-national) au milieu de l’hostilité avérée de 50 millions d’arabes, alors même que l’immigration juive et l’industrialisation progressive du pays développent dans les mêmes proportions la population arabe.
- parce qu’il espère obtenir ce résultat en comptant sur des manoeuvres entre les grandes puissances, qui, en réalité, veulent toutes utiliser uniquement le mouvement sioniste comme un pion dans leur jeu de puissance envers le monde arabe.
- parce qu’il pense pouvoir neutraliser l’antisémitisme dans le monde par le simple octroi d’une nationalité aux juifs, alors que cet antisémitisme a des racines sociales historiques et idéologiques profondes qui seront d’autant plus difficiles à arracher à mésure que se prolonge l’agonie du capitalisme.
- Réactionnaire :
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- parce qu’il sert de soutien à la domination impérialiste britannique, en donnant à l’impérialisme le prétexte de servir d’"arbitre" des différends judéo-arabes, en demandant lui-même le maintien du mandat britannique et en développant une économie juive « fermée » en miniature, dont les masses laborieuses ont un standard de vie beaucoup plus élevé et des intérêts immédiats différents de ceux des masses laborieuses arabes.
- parce qu’il provoque une réaction nationaliste de la part des masses arabes, cause une division raciale du mouvement ouvrier, accentue l’"union sacrée" chez les juifs et les arabes et permet ainsi à l’impérialisme d’éterniser ce conflit, moyen d’éterniser la présence des troupes en Palestine.
- parce qu’il ralentit le mouvement pour la révolution agraire en achetant des terres aux propriétaires fonciers arabes et en les exploitant grâce aux subsides étrangers comme une agriculture juive « fermée » à l’intérieur de l’agriculture palestinienne arabe. De ce fait la position des propriétaires fonciers est dans une certaine mesure renflouée, des terres sont enlevées aux paysans arabes et, ce qui est plus important que tout, la masse juive de Palestine n’a aucun intérêt à combattre pour le partage des terres des « effendis » parmi les paysans arabes car ce partage signifierait la fin de ses achats de terre.
- parce qu’il freine la participation des masses ouvrières juives à la lutte des classes dans le reste du monde, les sépare du prolétariat mondial, leur donne des buts autonomes à atteindre et crée des illusions quant à la possibilité d’améliorer leur sort dans le cadre du capitalisme mondial décadent.
Pour toutes ces raisons, le mouvement révolutionnaire ouvrier a toujours mené une lutte violente contre l’idéologie et la pratique sioniste. Les arguments que les représentants « socialistes » du sionisme avancent en faveur de leur cause sont soit les arguments réformistes classiques ("possibilité d’améliorer progressivement la situation des masses juives" ...) soit des arguments sociaux-patriotes ("il faut d’abord résoudre la question nationale pour tous les juifs avant d’entamer la solution des problèmes sociaux pour les travailleurs juifs"), soit les arguments classiques des défenseurs de l’impérialisme ("la pénétration des juifs en Palestine n’a pas seulement développé l’industrie, mais aussi le mouvement ouvrier, la culture générale des masses, leur niveau de vie, etc."), arguments avancés par les défenseurs du colonialisme dans tous les pays.
B. L’aspect actuel de la question juive dans le monde
Après la seconde guerre mondiale, la situation particulièrement tragique des juifs semble un symbole pour toute la tragédie de l’humanité glissant vers la barbarie. Après l’effroyable catastrophe du judaisme européen, les juifs, partout où ils se trouvent, font face à une recrudescence de l’hostilité de la population envers eux.
a) En Europe, deux ans après la « libération », plus de 100.000 juifs continuent à être soumis au plus infamant des régimes dans des camps ; les maîtres impérialistes qui réussirent, au cours de leurs opérations militaires, à déplacer des millions d’hommes en quelques jours de temps, n’ont pu trouver, après 20 mois de recherches, un refuge quelconque pour ces malheureux rescapés des camps nazis. Dans le reste du continent, il subiste à peine un million de juifs.
b) En Palestine, 700.000 juifs font face au monde arabe en plein ébullition. Le développement du capitalisme égyptien et syrien ajoute le facteur de concurrence économique aux multiples causes de l’anti-sionisme militant. L’impérialisme britannique, les féodaux et les bourgeois arabes feront, de leurs côtés, tout leur possible pour détourner la haine des masses opprimées arabes contre le bouc émissaire juif. De ce fait, les juifs palestiniens risquent de se voir exterminer dans l’explosion générale qui se prépare au Moyen Orient.
c) En URSS, la bureaucratie a utilisé dans sa lutte contre l’opposition, l’antisémitisme qui restait latent dans les masses paysannes et les couches ouvrières arrierées. Durant les années du premier et second plan quinquennal, des millions de commerçants et d’artisans juifs furent intégrés dans les rangs inférieurs et moyens de la bureaucratie comme ingénieurs, techniciens, directeurs de coopératives, et dans les couches supérieures des kolkhoses. Ils constituent en Russie occidentale cette partie de la bureaucratie qui est le plus directement en contact avec les masses opprimées et de ce fait, c’est en grande partie sur eux que se concentre la haine des masses contre les parasites et les profiteurs du régime. Les pogroms sanglants déclenchés par la population indigène lors de l’invasion allemande constituent des indices très clairs quant à l’exacerbation de cette haine (70.000 juifs tués à Kiev en 24 heures de temps). Une accentuation de la crise sociale en Russie, l’épuration de la guerre civile passeront certainement par l’extermination des masses juives au cas où se produirait une victoire de la contre-révolution.
d) Enfin aux Etats Unis le cantonnement des juifs dans les secteurs déterminés de l’artisanat, des professions commerciales et libérales, créera lors de la prochaine crise économique violente l’exacerbation de la concurrence qui donnera à l’antisémitisme présent de façon latente dès maintenant, une puissante base matérielle. L’exploitation des préjugés réactionnaires contre les « minorités raciales » est depuis longtemps l’arme préférée des gangsters fascistes américains. A mesure que l’accentuation de la crise sociale, la politisation du mouvement ouvrier et la décomposition rapide de la « démocratie » américaine, engendreront le développement d’un parti fasciste de masse, l’antisémitisme autant que l’agitation anti-nègre prendront des dimensions monstrueuses. Le sort des juifs aux Etats Unis est lié de la façon la plus intime à l’issue de la lutte gigantesque de la classe ouvrière américaine et de la bourgeoisie yankee. Une victoire de celle-ci à travers l’établissement d’une dictature, signifierait à brève échéance une catastrophe comparable seulement à la catastrophe que constitua pour les juifs d’Europe l’arrivée de Hitler au pouvoir.
La série interminable d’épreuves par lesquelles sont passées les masses juives en Europe, a sans aucune doute accentué le développement d’une conscience nationale, autant auprès des survivants qu’auprès des masses juives d’Amérique et de Palestine qui se sentent le plus étroitement liées au sort de leurs frères en Europe. Cette conscience nationale s’exprime de la façon suivante :
- les masses juives en général désirent maintenant affirmer leur nationalité propre en face des autres peuples. Un nationalisme juif violent répond à la violence des persécutions et de l’antisémitisme.
- les masses juives en Europe ont les yeux tournés vers l’émigration. En présence de la fermerture hermétique de toutes les frontières, par suite des conditions générales du monde d’après guerre et en concordance avec la vague de nationalisme qui les entraine, cette volonté de quitter le continent qui pour eux n’est qu’un vaste cimetière s’exprime avant tout en une volonté sioniste d’aller en Palestine.
- à l’intérieur du mouvement sioniste, la lutte pour « l’Etat Juif », jadis menée exclusivement par l’extrème droite ("les révisionnistes") est actuellement reprise par tous les partis ("Programme de Biltmore") sauf par le parti centriste Haschomer Hazair.
La renaissance de la conscience nationale des masses est un résultat de la décomposition du capitalisme, qui remet en question tous les problèmes résolus lors de sa période d’essor. S’appuyant fermement sur son programme et sur une analyse scientifique de la situation en Palestine, mais considérant en même temps l’état réel de conscience des masses juives, la IVème Internationale doit reconnaître comme légitime leur volonté de mener une existence nationale à eux. Elle doit démontrer concrètement que la conquête de cette nationalité est irréalisable dans la société capitaliste décadente, et plus particulièrement irréalisable et réactionnaire en Palestine. Elle doit démontrer que, pour les juifs, comme pour tous les autres peuples de la terre, la défense ou la conquête définitive de leur nationalité propre ne peut pas s’obtenir au moyen de la construction d’Etats et d’économies « fermées », mais que l’économie socialiste planifiée mondiale constitue le seul cadre réaliste dans lequel est actuellement possible un libre développement normal des peuples. La IVème Internationale doit rendre les masses juives conscientes des terribles catastrophes qui les attendent si la putréfaction du capitalisme poursuit son cours. Seule l’intégration du mouvement d’émancipation juif dans le mouvement ouvrier mondial permettra une solution harmonieuse du problème juif. La planification socialiste « bouleversant la topographie du globe » (Trotsky) assurera à tous ceux qui le désirent une existence nationale particulière dans le cadre des Etats Unis du monde.
Mais la IVème Internationale ne gagnera jamais une influence décisive auprès des masses juives en prêchant uniquement la nécessité de la révolution socialiste pour leur émancipation. Ce n’est qu’en prenant la tête d’un vaste mouvement mondial de solidarité de la part du prolétariat envers les victimes des persécutions impérialistes et fascistes ; ce n’est qu’en montrant en pratique aux juifs que les solutions proposées par le mouvement révolutionnaire sont plus favorables et plus réalistes que la « solution » sioniste, que la IVème Internationale réussira au prochain tournant à englober les masses juives dans la lutte anti-impérialiste mondiale. Marcher actuellement contre le courant sioniste ; lui opposer une issue autre immédiate et concrète, tels sont les deux éléments indispensables pour préparer l’étape prochaine ; quand les masses juives auront fait leur expérience décevante avec le sionisme, quand elles auront compris l’inutilité de leurs efforts et de leurs sacrifices, elles se tourneront vers nous à condition que nous sachions dès maintenant aller vers elles avec nos solutions autant qu’avec une critique implacable du sionisme.
a) Toutes les sections de la IVème Internationale doivent mettre en avant le mot d’ordre : « Ouvrez les portes de tous les pays aux réfugiés juifs ! », « Abolition de toutes les restrictions à l’immigration ». Ce slogan doit être défendu plus spécialement par le SWP des Etats Unis d’une part et par nos sections anglaise, canadienne, française et toutes nos sections de l’Amérique latine d’autre part. Ces dernières ainsi que notre section australienne, et plus particulièrement les sections d’Argentine et du Brésil doivent joindre à ces slogans les mots d’ordre : « Abolition de toutes les clauses de discrimination raciale et religieuse dans la législation sur l’immigration ». Chaque occasion concrète (plaints sur le manque de main-d’oeuvre et sur la diminution de la population ; ouverture partielle du pays pour certaines catégories d’immigrés ; acte de commémoration en faveur des victimes du fascisme...) doit être employée pour alerter l’opinion publique ouvrière du pays et pour exiger le déclenchement d’actions concrètes en vue d’obtenir des résultats immédiats. Des résolutions telles que celles du CIO doivent être employées comme point de départ pour exiger des actions de la part de la FSM, pour organiser des mouvements concertés dans les secteurs de la vie économique et sociale les plus aptes à exprimer leur solidarité par l’action (marins, employés gouvernementaux, fonctionnaires...) à travers des grèves perlées, des sabotages organisés ; des mesures de discrimination, des protestations, des meetins et des manifestations coordonnées, etc. C’est seulement dans la mesure ou nos sections pourront prouver aux juifs qu’elles luttent réellement et efficacement pour l’ouverture de leur propre pays a l’immigration qu’elles pourront les amener a préférer l’immigration dans ces pays a l’immigration en Palestine, plus dure à obtenir et constituant en même temps un acte contraire aux intérêts vitaux des masses anti-impérialistes du Moyen-Orient.
b) Toutes les sections de la IVème Internationale doivent s’atteler sérieusement à la tâche de combattre les relents d’idéologie antisémite qui subsistent ou se développent toujours davantage, dans de larges couches de la populations de tous les pays. Ce travail de désintoxication est d’autant plus urgent que le mouvement ouvrier « officiel », à la fois par conformisme, par lâcheté ou par d’étroits calculs partisans (l’antitrotskysme du PCF s’exprime pas mal de fois par des arguments antisémites...) ne fait rien pour éliminer de la conscience des masses le poison anti-juif deposé par la propagande hitlérienne. En toute occasion concrète, nos sections doivent détruire les mensonges fascistes au sujet du « capitalisme juif » ou des « accapareurs juifs ». Elles doivent alerter systématiquement les organisations de masse prolétariennes contre chaque tentative de reconstruire ces organisations antisémites. Utilisant les exemples tragiques des dernières années, elles doivent imprègner la conscience des masses de cette vérité fondamentale, leur propre sort est en jeu dans la lutte contre le gangstérisme antisémite. C’est seulement dans la mesure où nos sections feront admettre par les masses cette vérité et la leur feront traduire en actes, qu’elles réussiront à convaincre les juifs que seule l’intégration de leur mouvement d’émancipation dans le mouvement ouvrier mondial les rendra aptes à se défendre efficacement contre de nouvelles vagues d’antisémitisme.
c) Toutes les sections de la IVème Internationale qui font face à un mouvement fasciste organisé utilisant à fond la démagogie antisémite et passant à des actes terroristes contre les juifs, doivent s’efforcer de mobiliser la classe ouvrière dans des formations armées (Milice...) pour la défense des juifs. Là où la population juive est géographiquement concentrée en des quartiers juifs, elles doivent proposer et favoriser la création de milices d’auto-défense armées en s’efforçant de les fusionner avec les milices ouvrières. Elles doivent expliquer aux masses juives que seule cette fusion dans la lutte armée peut garantir une défense efficace ; mais en même temps elles doivent avertir les travailleurs que seule une défense armée des juifs préviendra l’écrasement ultérieur par les mêmes armées fascistes du mouvement ouvrier tout entier.
C. L’aspect actuel du problème palestinien
Le problème palestinien a reçu une importance nouvelle et particulière depuis la fin de la deuxième guerre mondiale par suite d’une série de « facteurs nouveaux » qui changent profondément sa physionomie.
a) L’industrialisation du Proche et du Moyen Orient a raffermi dans une certaine mesure les bourgeoisies arabes indigènes en Egypte, en Palestine même, en Syrie, au Liban et dans une moindre mesure dans d’autres pays arabes. La différenciation sociale de la vieille société arabe féodale ou patriarcale s’est accélerée. Un prolétariat arabe beaucoup plus puissant numériquement et politiquement déjà conscient est apparu sur la scène politique dans de nombreux pays du moyen-orient (grèves en Egypte, Palestine, Syrie, Iran et Iraq). Le nationalisme arabe se différencie de la même façon. A côté du panislamisme féodal et réactionnaire apparaît maintenant un courant panarabe progressif qui voit dans la réalisation d’une Union des pays Arabes du Moyen Orient le seul cadre réel pour le développement des forces productives et pour la constitution d’une nation arabe. La bourgeoisie ne peut défendre cette idée que d’une façon hésitante sur le plan idéologique, dans la mesure où elle désire une expansion du marché pour son industrie qui, dès la fin de la guerre, se trouve plongée dans une profonde crise. La seule force capable de réaliser ce programme de la révolution nationale-démocratique du monde arabe est le prolétariat qui seul est capable de mener jusqu’au bout, à travers le mécanisme de la révolution permanente la lutte contre le féodalisme pour la révolution agraire, pour l’émancipation du monde arabe de l’intervention impérialiste et pour la constitution de l’unité du monde arabe.
b) L’accentuation des mouvements anti-impérialistes dans le cadre des révolutions coloniales, les plus importants bouleversements dans la période immédiate après la seconde guerre mondiale, l’affaiblissement des vieilles puissances impérialistes (Grande Bretagne, France, Italie) a eu pour conséquence que la bourgeoisie et même certaines couches féodales ont saisi la possibilité d’obtenir par pression, et sans devoir déclencher de véritables luttes de masses, devant quoi elles reculent toujours, des concessions importantes de la part des puissances occupantes, telles que le retrait des troupes françaises de la Syrie et du Liban, et la préparation du retrait des troupes britanniques de l’Egypte. Ces différents reculs de la part de l’impérialisme constituent un stimulant pour la lutte anti-impérialiste dans les autres pays coloniaux du Moyen-Orient. Ils donnent un coup très fort au prestige de l’impérialisme et augmentent la confiance des masses indigènes dans leurs propres forces.
c) La transformation de la Palestine en position-clé du système de défense impériale dans la Méditerrannée orientale. Après le retrait des troupes britanniques d’Egypte, la Palestine sera la base essentielle de la flotte, de l’aviation, de l’armée de terre et des services secrets britanniques dans la Méditerrannée orientale, la position-clé pour la défense du Canal de Suez et la route impériale vers les Indes. Les fortes concentrations de troupes britanniques en Palestine prennent les troubles terroristes uniquement comme prétexte. En réalité, il s’agit pour l’impérialisme britannique de construire une base durable en vue des conflits guerriers futurs et de la défense de l’Empire.
d) La transformation du Moyen Orient en un des enjeux principaux de la rivalité entre les « trois grands ». Avant la guerre le Moyen Orient était le secteur du monde ou l’influence prédominante de l’impérialisme britannique était le moins menacée. Depuis lors, la poussée de Rommel jusqu’à El Alamein, l’installation d’"observateurs" américains dans le royaume d’Ibn Seoud, le déclenchement de la dispute anglo-américaine pour le pétrole iranien, la pénétration de l’Eglise orthodoxe dans tout le Moyen Orient comme une grande agence de la diplomatie du Kremlin, - tous ces événements ont remis en question la domination exclusive britannique sur cette partie du monde et ont transformé celle-ci en un terrain de conflits constants entre les grandes puissances. Le Moyen Orient constituant en outre le réservoir le plus vierge et le plus important de pétrole dans le monde entier, il devient également à l’étape actuelle le terrain de dispute principal dans la lutte mondiale pour cette matière première stratégique dont les réserves aux Etats Unis et en URSS sont fortement atteintes. Les différents mouvements « tactiques » de la diplomatie américaine et soviétique envers le mouvement sioniste doivent être considérés essentiellement comme des éléments de leurs intrigues tendant à supplanter la domination britannique dans le monde arabe.
e) La demande d’immigration en Palestine mise en avant par la masse des réfugiés juifs en Europe, et soutenue par un mouvement puissant de protestation de la part du sionisme américain et culminant dans les actions « pacifiques » entreprises par la Hagana en Palestine, ainsi que dans le terrorisme des bandes « Irgun Zvei Leumi » et « Stern ».
Le point de départ de la position de la IVème Internationale en face du problème palestinien doit être constitué par la compréhension de la nécessité de la lutte anti-impérialiste menée par les arabes, à laquelle elle donne comme objectif la constitution de l’Union des pays arabes du Moyen Orient. Ce sont les masses arabes, les ouvriers et paysans pauvres, qui constituent la force révolutionnaire du Moyen Orient et également de la Palestine, grâce à leur nombre, à leurs conditions sociales, à leur vie matérielle, qui les mettent directement en conflit avec l’impérialisme. C’est sur le dynamisme de la lutte des classes, menée pour la défense de leurs intérêts que doit s’appuyer tout d’abord le parti révolutionnaire. Se développant au fur et à mesure que le prolétariat arabe croît et se renforce la section du Moyen Orient de la IVème Internationale constituée sur la base des noyaux existants en Palestine et en Egypte, doit diriger les actions des masses pour la défense de leurs intérêts quotidiens, élever la conscience ouvrière à la compréhension de la nécessité de l’action politique et travailler à souder le bloc de tous les exploités autour du prolétariat révolutionnaire à travers la lutte pour les quatres revendications essentielles suivantes :
- Départ immédiat des troupes britanniques. Indépendance complète de la Palestine.
- Convocation immédiate d’une Assemblée Constituante Unique et souveraine.
- Expropriation des terres des effendis et gestion des terres expropriées par des comités de paysans pauvres.
- Expropriation de toutes les entreprises propriété du capital étranger et gestion par les travailleurs des entreprises nationalisées.
C’est à travers la lutte pour ces quatre objectifs principaux et centraux que le parti révolutionnaire éduquera les masses quant à la nécessité de s’opposer de plus en plus à la bourgeoisie arabe, étroitement liée aux effendis. Quand la lutte des masses atteindra son point culminant, quand des comités ouvriers et paysans couvriront le Moyen Orient et quand la question de la prise du pouvoir par le prolétariat arabe sera mise à l’ordre du jour, le parti révolutionnaire aura suffisemment éduqué les masses pour les amener également à l’expropriation de la bourgeoisie « nationale ».
Ces quatre objectifs peuvent-ils se réaliser à l’étape actuelle dans une lutte commune entre les masses arabes et les masses ouvrières juives ? Pour répondre à cette question, on ne doit pas partir de schémas abstraits, mais de la réalité sociale et idéologique de la vie juive en Palestine. A l’exception de quelques milliers d’ouvriers juifs employés aux chemins de fer, à l’IPC, à la raffinerie et aux installations portuaires, tout le prolétariat industriel et agricole juif de Palestine est employé dans une industrie juive fermée, travaillant avec des afflux constants de capitaux étrangers et garantissant aux travailleurs juifs un standard de vie bien supérieur à celui des travailleurs arabes. En plus la communauté juive en Palestine vit dans la crainte constante d’un soulèvement arabe et en face de ce danger met tout son espoir dans une immigration continuelle et dans le maintien de l’occupation britannique. Nous pouvons donc constater plus spécialement :
a) Loin de vouloir le départ immédiat des forces d’occupation britanniques, les masses juives désirent au contraire leur maintien dans le pays. La seule chose que réclament les leaders sionistes, bourgeois aussi bien qu’ouvriers, ce sont des concessions quant à l’immigration et à la constitution d’un Etat juif. Mais l’écrasante majorité des juifs de Palestine (en premier lieu la « Hagana ») ne sont prêts à « agir » contre l’impérialisme que dans la mesure où cette « action » ne met pas en danger la « sécurité » fondamentale de la communauté juive en face du monde arabe. Voilà pourquoi une lutte armée, ou même une vaste action de sabotage entreprise par les masses juives est à l’étape actuelle, pour ainsi dire exclue. Le but de l’action sioniste actuelle c’est uniquement d’exercer une pression sur l’impérialisme britannique pour obtenir des concessions, et non pas de pousser à son expulsion de Palestine.
Le mouvement terroriste et le soi-disant « comité hebreu de libération nationale » posent bien l’objectif de l’expulsion de l’impérialisme britannique de Palestine. Mais ils ne peuvent concevoir cette expulsion que sous la forme d’un armement général des juifs de Palestine qui tiendraient en échec le monde arabe jusqu’au moment où une immigration massive des Juifs les rendrait militairement capables de s’opposer à la « menace arabe ». Abstraction faite du caractère parfaitement utopique de ces vues, elles sont ultra-réactionnaires et ne peuvent qu’élargir davantage le fossé qui sépare les travailleurs juifs et arabes de Palestine.
b) Tous les juifs de Palestine sont opposés à la convocation immédiate d’une Assemblée Constituante qui mettrait le pouvoir entre les mains de la majorité de la population qui est arabe.
Les terroristes prétendent lutter pour une Palestine libre, indépendante et démocratique. Mais étant les partisans les plus acharnés d’un « Etat juif », eux aussi doivent trouver un biais pour enlever la souveraineté à la majorité de la population du pays. Ils déclarent n’être prêts à organiser des élections générales qu’après avoir donné aux juifs dans l’exil « une chance dans une limite de temps déterminée » de rentrer en leur pays. En d’autres termes, ils ne sont partisans d’élections générales qu’à partir du moment où les juifs constitueraient la majorité absolue de la population.
c) Les juifs n’ont aucun intérêt à l’expropriation des effendis, car cette expropriation leur enleverait en pratique toute possibilité d’acheter des terres nouvelles et d’élargir leur « économie fermée juive » en Palestine.
d) Ils sont opposés de façon encore plus acharnée à l’expropriation des entreprises construites avec le capital étranger et à la fermeture du pays à l’importation de capitaux, car cela constituerait un coup mortel pour leur économie juive.
De tout cela s’impose la conclusion qu’à l’étape actuelle les masses juives de Palestine ne constituent pas, dans leur ensemble, une force anti-impérialiste et que la constitution d’un bloc judéo-arabe anti-impérialiste ne peut pas constituer un slogan dans l’agitation immédiate.
C’est en fonction de ces considérations que doit être considérée la question de l’immigration juive en Palestine. Aussi longtemps que les deux économies, juive et arabe, constitueront des économies séparées en Palestine, la population laborieuse arabe considérera chaque nouvel afflux d’immigrés juifs comme un acte d’hostilité ouvert. Alors que toute la population de Palestine vit avec la perspective de l’éclatement d’un conflit sanglant dans le Moyen Orient, les masses arabes doivent nécessairement considérer l’arrivée de nouveaux immigrés comme l’arrivée de soldats ennemis, ce qui se confirme d’ailleurs par la façon dont les masses juives considèrent cette immigration. Voilà pourquoi il faut avoir conscience du fait que la continuation de l’immigration juive en Palestine élargit la brêche entre ouvriers juifs et arabes, renforce les positions et éternise la présence de l’impérialisme britannique et ne peut que préparer, à l’étape suivante, l’extermination complète de la minorité juive lors du soulèvement arabe.
Si donc la IVème Internationale doit faire tout son possible pour déconseiller aux réfugiés juifs l’émigration vers la Palestine ; si dans le cadre d’un mouvement de solidarité mondiale elle doit essayer de leur faire ouvrir les portes d’autres pays, et les avertir que la Palestine constitue pour eux un véritable guet-apens, elle doit dans sa propagande concrète en face de la question de l’immigration juive partir de la souveraineté de la population arabe. Seule cette population arabe a le droit de déterminer si, oui ou non, l’immigration en Palestine doit être ouverte ou fermée aux juifs. La question de l’immigration doit être décidée par l’Assemblée Constituante, élue par tous les habitants du pays agés de 18 ans au moins. Telle est la seule position démocratique en face de ce problème, position qui en même temps entre dans le cadre de la stratégie générale de la révolution au Moyen Orient.
Par conséquent la IVème Internationale doit condamner et combattre la répression britannique en face de l’immigration juive, dénoncer toutes les mesures policières et y opposer chaque fois concrètement la revendication du retrait immédiat des troupes britanniques. Il n’est pas difficile d’expliquer aux masses arabes que cette répression impérialiste limitée contre les juifs n’est que la préparation d’une répression beaucoup plus violente contre les futurs mouvements arabes. Il est dans l’intérêt des masses arabes de profiter de chaque mouvement d’indignation en face de la terreur policière britannique pour poser concrètement la question du retrait des troupes britanniques. Il s’averait d’ailleurs dans ce cas que les « victimes » mêmes de cette répression n’accepteraient pas du tout cette lutte conséquente contre leurs « oppresseurs ».
De même la IVème Internationale doit s’opposer à toutes les « solutions » que l’impérialisme propose et réaliserait éventuellement avec ou sans l’aide de ses agents dans l’Agence juive. Ces solutions telles que le partage de la Palestine, l’immigration limitée de 100.000 juifs, la remise du mandat à l’ONU ont toutes pour but d’éterniser la présence des troupes britanniques dans ce pays et enlèvent toujours à la majorité de la population son droit de disposer d’elle-même.
A l’étape actuelle, l’union générale entre juifs et arabes en Palestine est irréalisable ; ce n’est que sur un plan tout à fait limité, et dans la mesure ou une partie des travailleurs juifs est employée en dehors de l’économie juive « fermée » que des grèves judéo-arabes comme celles de l’année passée ont pu se produire. Mais cela ne signifie pas que cette union soit exclue pour tout le temps. Actuellement la population juive de Palestine a tendu tous ses efforts vers le renforcement de ses positions autonomes économiques et politiques. Mais déjà la partie radicale de la jeunesse nationaliste juive a eu conscience de l’inutilité de ces efforts de « conciliation » et de « manoeuvre » de la part de l’Agence juive afin d’obtenir de l’impérialisme ou des grandes puissances une immigration illimitée et la constitution d’un Etat juif. La vague actuelle de terrorisme de la part des bandes « Irgun Zwei Leumi » et « Stern » constitue des actes de désespoir de la part de cette minorité, utilisée et abandonnée ensuite par les leaders bourgeois du mouvement sioniste et provenant de l’impasse dans laquelle s’est fourvoyé tout le mouvement. Bien entendu, ce terrorisme de désespoir ne constitue pas en lui même la voie d’une solution au problème palestinien. Bien au contraire. Face au terrorisme les féodaux at les bourgeois arabes réussissent à créer une atmosphère de « solidarité » factice entre les masses et l’impérialisme et accentuent l’hostilité entre ouvriers arabes et juifs. Du point de vue militaire, ces actes ne peuvent qu’accélérer l’établissement d’une force policière étrangère britannique en Palestine, but de toute la politique impériale d’après-guerre. Mais en tant que stade ultime du sionisme le terrorisme, en ne donnant aucun résultat concret, peut rendre les éléments les plus conscients et les plus actifs dans les masses juives aptes à réconsidérer toute la question du sionisme et de la solution du problème juif. C’est cette reconsidération que la IVème Internationale doit préparer à l’étape actuelle.
Une union éventuelle entre juifs et arabes doit tout d’abord passer par l’abolition de toute idéologie et pratique raciste de la part des juifs.
- A bas les entreprises exclusivement juives ! Pour l’embauchage d’ouvriers arabes dans toute l’industrie du pays !
- A bas les syndicats juifs et arabes séparés ! Pour la constitution des syndicats juifs et arabes !
- A bas le boycott camouflé des produits arabes ou juifs. A bas l’"économie juive fermée" ! Pour l’intégration mutuelle des économies juives et arabes.
- A bas l’idée d’un « Etat juif » imposé à la majorité de la population du pays ! Pour l’élimination des idées sionistes du mouvement ouvrier ! Pour l’intégration des travailleurs juifs dans le mouvement de la révolution nationale-démocratique des masses arabes.
- Pour la rupture des syndicats et organisations ouvrières juives avec l’Agence Juive, et la publication intégrale de tous les procès verbaux secrets de cet organisme.
- Pour la rupture des syndicats et organisations ouvrières arabes avec la Ligue Arabe et le Haut Comité Arabe pour la Palestine, et la publication intégrale de tous les procès verbaux secrets de ces organismes.
Tous ces mots d’ordre qui ne peuvent être défendus actuellement qu’en tant que slogans de propagande générale se heurtent nécessairement à une opposition farouche de la part des sionistes non seulement pour des raisons idéologiques mais aussi et surtout parce que la situation matérielle favorisée des juifs par rapport aux arabes est ainsi mise en jeu. Mais à mesure que la faillite du sionisme éclatera de plus en plus aux yeux des masses ; à mesure que l’immigration se ralentira et que le danger extrème de l’explosion arabe approchera davantage ; à mesure que notre propagande contribuera à faire admettre aux masses que c’est une question de vie ou de mort pour elles de trouver un terrain d’entente avec les masses arabes, même au prix d’un abandon momentané de certains privilèges - nos mots d’ordre pourront passer du stade propagandiste au stade de l’agitation, et pourront favoriser une scission entre le mouvement ouvrier et le sionisme. C’est cela qui constitue la condition sine qua non pour la réalisation de l’unité d’action judéo-arabe contre l’impérialisme, et c’est cela qui pourra seul empêcher que la révolution arabe du Moyen Orient passe sur le cadavre du judaisme palestinien. Ici comme parmi les masses juives dans le reste du monde, une ferme position contre le courant à l’étape actuelle est seule capable de préparer un renversement du courant à l’étape suivante.
Cela implique également la nécessité pour les sections de la IVème Internationale de mener un travail de propagande préparatoire à l’intérieur des organisations d’extrème-gauche sionistes. En démontrant que le slogan d’un « Etat bi-national » est un slogan nationaliste, anti-démocratique, allant à la fois à l’encontre du droit des peuples à disposer d’eux-mêmes et des besoins immédiats de la lutte anti-impérialiste en Palestine, nos militants doivent en même temps mettre à tout moment à l’ordre du jour la question de la réalisation concrète du slogan de l’unité judéo-arabe. Ils doivent mettre les dirigeants centristes en face de leurs responsabilités, mettre à l’ordre du jour l’adoption du programme anti-racial énuméré plus haut et accélérer ainsi l’évolution de la conscience de l’avant-garde ouvrière juive au delà du sionisme.