Le
mot d'ordre de « reconversion » est très populaire parmi les
travailleurs wallons. Les résolutions votées au congrès
statutaire de la Régionale F.G.T.B. Liège-Huy-Waremme, du 30
novembre 1968, le mentionnent à plusieurs reprises. Les déclarations
du P.S.B. et du P.C.B. en Wallonie en font autant. Le P.W.T.,
lui aussi, a souvent parlé de « reconversion ».
Ce mot
d'ordre est accepté par les travailleurs pour une raison évidente.
Ils se rendent compte que le déclin de l'économie wallonne,
qu'ils subissent depuis plus de dix ans, provoque des fermetures
d'entreprises et des licenciements, réduit l’emploi, fait réapparaître
le chômage, pèse sur la force syndicale et la combativité
ouvrière, et détériore généralement leurs conditions de
travail et d’existence.
Aussi
désirent-ils ne plus vivre à l’ombre d une menace de perte
d'emploi. Ils désirent encore davantage épargner à leurs
enfants cette hantise qu ils avaient déjà connue entre 1929 et
1939, et qui a réapparu si fortement depuis 1958. C'est cela
qu'ils entendent par reconversion.
Quel
contenu faut-il donner à ce mot d'ordre pour ne pas décevoir
le monde du travail, pour ne pas provoquer des illusions qui déboucheront
sur d’amères déconfitures ?
D'où
provient le déclin de l’économie wallonne?
La
campagne en faveur de la « reconversion » vise à arrêter le
déclin de l'économie wallonne. Ce déclin avait été prédit
par la gauche du mouvement ouvrier de ce pays dès les années
1954-56. Depuis la crise charbonnière, il s'est poursuivi et
approfondi d'année en année.
Rares
sont les personnes de bonne foi qui contestent les faits. Il est
remarquable qu’en Wallonie, toutes les formations politiques,
y compris le P.L.P., le prennent comme point de départ de leurs
analyses et propositions politiques et économiques.
Mais
pour pouvoir formuler des solutions valables, il faut commencer
par définir les causes du mal, Et à ce propos, les avis ne
sont plus unanimes. Pour les uns, ce sont « les Flamands » qui
sont responsables du déclin économique wallon, parce qu'ils
ont, depuis quinze ans, « tiré la couverture » vers le
Nord du pays. Les plus fanatiques des représentants de cette thèse
inculpent, outre les Flamands, « la politique du Bénélux ».
D'autres
rendent l'Etat unitaire responsable du malaise wallon. C'est la
politique «flamingante» ou «pro-flamande» des gouvernements
qui se sont succédé en Belgique depuis vingt ans qui aurait
systématiquement orienté les investissements vers la partie
flamande du pays.
Certains
incriminent « les étrangers » (avant tout les capitalistes étrangers),
qui auraient favorisé la Flandre et Bruxelles aux dépens de la
Wallonie. Les statistiques démontrent en effet que la majeure
partie des investissements étrangers se sont réalises, en
Belgique, depuis quinze ans, ailleurs qu en Wallonie.
Finalement,
les plus réactionnaires accusent « les socialistes » et les
syndicalistes wallons. Les socialistes qui ont administré la
plupart des régions et communes industrielles de Wallonie
depuis un demi-siècle, auraient négligé l'infrastructure Les
syndicalistes, en « exagérant » les revendications salariales
et en faisant de la « gréviculture», auraient « découragé
l'épargne » et « chassé les investissements ».
Toutes
ces explications, qui contiennent évidemment toutes un grain de
vérité, passent à côté du problème essentiel. Elles évitent
toutes de définir la nature de l'économie belge et wallonne.
Or il suffit de définir cette nature pour préciser les
responsables de l'évolution économique. Et à partir du moment
où l'on sait qui est responsable de cette évolution, on ne
peut plus se tromper quant à la responsabilité principale
concernant le déclin économique de la Wallonie.
Le
capitalisme, et avant tout les grands groupes financiers, sont
les responsables du déclin économique de la Wallonie
L'économie
belge est une économie capitaliste. L'économie capitaliste est
gouvernée par la recherche du maximum de profits. S'il y a déclin
économique de la Wallonie, c'est que par un concours de
circonstances, les capitalistes pouvaient obtenir plus de
profits en Flandre, à Bruxelles (et à l'étranger) qu'en
Wallonie. Au lieu de chercher midi à 14 heures, c'est cette vérité
fondamentale qu'il faut proclamer avec force, quand on veut déterminer
qui est responsable du déclin économique wallon.
Mais
l'économie belge n'est pas une économie capitaliste à l'époque
de la libre concurrence, du laissez faire, et du libéralisme économique.
C'est une économie capitaliste à l'époque des monopoles, une
économie capitaliste dominée par une dizaine de holdings et de
groupes financiers.
Revoyez
l'étude préparée pour le congrès extraordinaire d'octobre
1956 de la F.G.T.B., depuis lors confirmée par mainte nouvelle
analyse (par exemple celle du C.R.I.S.P.). Personne ne peut sérieusement
contester que les décisions stratégiques d'orientation de l'économie
belge sont prises par les Conseils d’administration de cette
dizaine de holdings et de groupes.
Si
la responsabilité fondamentale du déclin économique de la
Wallonie incombe donc aux capitalistes en général, la
responsabilité principale est celle des groupes financiers (à
commencer par la Société Générale, le groupe de Launoit, les
groupes Empain, Evence-Coppée, Solvay, Lambert, Sofina, les
plus importants d'entre eux).
Cette
responsabilité peut être circonscrite de manière précise.
Depuis dix ans, ces groupes ont retiré des milliards de francs
des industries en déclin absolu (charbon, textiles) ou relatif
(sidérurgie). Ils ont obtenu des subsides et subventions qui s'élèvent
à des dizaines de milliards de francs. Ils ont placé à étranger
d'autres dizaines de milliards de francs. Ils disposent de
capitaux liquides ou semi-liquides en quantités énormes. Ils
ont préféré placer ces capitaux sous les formes les plus
diverses dans les régions et les pays les plus divers : seule
une fraction minime de ces capitaux a été utilisée pour créer
des industries nouvelles en Wallonie.
Pourquoi
ces gros financiers ont-ils agi de la sorte ? Pas parce qu'ils
sont « flamingants » (ils sont tout autres que ça !), ou
parce qu'ils « détestent la Wallonie ». Encore moins parce
que l'Etat unitaire les y aurait contraints (ce sont eux qui
commandent cet Etat, et non cet Etat qui leur commande). S'ils
ont agi de la sorte, c'est qu'ils y trouvaient leur profit, ni
plus ni moins. Il n'y a pas d'autre explication à chercher, en
dehors de cette évidence On attend toujours l'exemple d'un gros
capitaliste qui réaliserait des investissements contraires à
ses intérêts et à la loi du profit, du seul fait de ses préférences
religieuses, ethniques, idéologiques ou linguistiques. On
attendra longtemps.
Pourquoi
était-il plus avantageux pour les groupes financiers belges et
étrangers d'investir en Flandre au cours
des quinze dernières années, plutôt qu'en Wallonie ?
Parce qu'en Flandre, il y avait beaucoup plus de chômeurs
qu’en Wallonie. Parce que les salaires y étaient souvent plus
bas (par suite du chômage et d’un mouvement syndical moins
combatif). Parce qu’on s’y trouvait plus près des ports,
facteur important pour des industries qui doivent importer loin
leurs matières premières et exporter par mer une partie
importante de leur production. Parce que les avantages
industriels que la Wallonie avait tiré de ses richesses minérales
disparaissent avec le déclin international du charbon comme
source énergétique. Parce que l'infrastructure wallonne était
ancienne - et donc plus démodée - que celle la Flandre, du
fait que la Wallonie avait été industrialisée avant la
Flandre. Etcaeteri, etcaetera.
Toutes
ces raisons, et quelques autres encore on les retrouve dans tous
les pays capitalistes d'Europe (et même aux Etats-Unis). Elles
expliquent le déclin relatif des vieux bassins industriels tels
le Pays de Galles et l'Ecosse en Grande-Bretagne; la Ruhr en
Allemagne; le bassin de la Loire et la région du Nord en
France; la région de Gênes en Italie ; le bassin de la
Nouvelle-Angleterre, et une partie du bassin industriels de
Pennsylvanie et du Kentucky (notamment le bassin charbonnier des
Appalachians) aux Etats-Unis. II n'y a peu ou pas d'incidences
linguistiques ou ethniques dans ces phénomènes parallèles. Il
ne faut donc pas en rechercher non plus pour comprendre le déclin
économique de la Wallonie.
Les
buts véritables de la « reconversion » néocapitaliste
La
cause du déclin économique wallon, c'est la chute relative du
taux de profit capitaliste en Wallonie. Le but de la politique
bourgeoise de « reconversion » de la Wallonie, c'est de faire
remonter ce taux de profit capitaliste. C'est brutal. C'est
peut-être cruel. Mais il faut appeler les choses par leur nom.
Le
raisonnement des économistes bourgeois, et de toute la suite de
doctrinaires nationalistes à la Perin qui leur emboîtent le
pas, est simple. « Les capitaux ne s'investissent-ils plus, en
quantité suffisante, en Wallonie, parce que ces investissements
ne sont plus tellement profitables ? Faisons donc en sorte
qu'ils deviennent plus profitables. Les investissements
reviendront ! »
Tout
ce qu'on agite, publiquement et en coulisse à pour but
d'augmenter les profits des capitaux investis en Wallonie. On réclame
plus de subsides pour l'industrie privée. On réclame des
travaux d'infrastructure multiples qui représentent autant d'économies
externes pour les capitalistes. On réclame une formation accélérée
de travailleurs qualifiés par les pouvoirs publics, ce qui réduira
d autant les frais de formation de la main d’œuvre pour
l'entreprise privée.
Et
lorsqu'on réclame un Exécutif wallon, c'est dans l’espoir
explicite que cet Exécutif fera retomber sur les têtes des «
pauvres » capitalistes wallons la manne d'or des subventions et
subsides que l'Etat unitaire leur aurait distribués trop
chichement. Les Perin et consorts ajoutent : surtout pas de
nouvelles grèves ; cela découragerait les investissements et
accentuerait le déclin de la Wallonie.
Devant
la manifestation des jeunes, à Ciney, les démagogues du
Rassemblement Wallon, ont récemment accusé le malheureux
Collard de vouloir « diviser les Wallons » parce qu'il a lancé
un appel timide (et équivoque) à l'unité entre travailleurs
chrétiens et travailleurs socialistes. Car pour ces messieurs,
travailleurs et capitalistes wallons devraient s'unir, comme
lors de la manifestation de Charleroi, saluée avec ferveur par
la « Libre Belgique ».
Perin
n'est-il pas étonné de se trouver brusquement dans la même
barque avec les ultra-unitaires et ultra-conservateurs de la
« Libre Belgique » ? Le secret de ces retrouvailles est
simple. La « Libre Belgique » peut faire cent serments par
jour de fidélité au Roi, à la Foi et à la Patrie. Mais elle
n'a qu'une seule religion véritable : l'adoration du profit
capitaliste. La manifestation de Charleroi, où les
syndicalistes et les travailleurs ont «sagement» rentré leurs
drapeaux rouges et leurs revendications de classe pour ne plus défendre
qu'un programme commun avec leurs patrons et exploiteurs, représentait
pour elle un triomphe historique. Cela nous a ramené trois
quarts de siècle en arrière. Ce qui a brusquement uni la «
Libre Belgique » et François Perin, c'est que ce dernier -
sous prétexte d'assurer la « reconversion » de la Wallonie -
est également devenu un champion de la noble cause du profit
capitaliste.
Les
capitalistes et leurs idéologues ont toujours affirmé que les
travailleurs, en menant leur lutte de classe, «découragent l'épargne
», « font fuire les capitaux », et agissent donc « en faveur
de l'étranger ». Les socialistes et syndicalistes ont toujours
répété que pour défendre les intérêts de classe des
travailleurs, il faut que ceux-ci s'unissent sans distinction de
métier, de profession, de religion, de nationalité ou
d'ethnie. « Les
sales marxistes divisent les Allemands » (pardon : les Belges;
re-pardon : les Wallons), répètent les ultra-nationalistes de
tout poil, depuis près d'un siècle. Nous voulons unir les
travailleurs contre les capitalistes, de notre propre pays et de
tous les pays, ont rétorqué les socialistes et les communistes
depuis belle lurette. Il n'y a pas d'autre voie pour défendre
la cause des travailleurs, et éviter que ceux-ci soient sacrifiés
sur l'autel du profit capitaliste (fût-ce sous prétexte de «
reconversion »).
La
“reconversion” néocapitaliste n’est qu’un leurre
La
« reconversion » néo-capitaliste a déjà une solide
tradition en Belgique. C'est une tradition « flamande » que
les Perin et Cie (et tous ceux, au P. S. B. et à la F.G.T.B.,
qui leur emboîtent le pas) voudraient promptement transplanter
en Wallonie.
Les
dirigeants F.G.T.Bistes du Limbourg ont agi pour la «
reconversion » néo-capitaliste de «leur» région, quand ils
ont accepté le marché scandaleux que leur proposaient les
chefs de Ford-Cologne : « Nous nous établirons dans votre région,
à condition que vous acceptiez des salaires plus bas et une durée
du travail plus longue que dans l'industrie automobile d'Anvers»...
On connaît la suite.
Feu
Spinoy a prôné la « reconversion » néo-capitaliste, quand
il a jeté à la face d'André Genot et de toute la gauche de l'époque,
au congrès du P. S. B. de décembre-1958, cette parole prophétique
: « Ce n'est pas en faisant des grèves que vous attirerez des
capitaux ». Les gens de la Volksunie ont badigeonné sur un mur
de Louvain ce slogan éloquent : « Des patrons flamands pour
les travailleurs flamands ». Mais ce que les travailleurs désirent
(voir l'explosion de mai 1968 en France, qui peut se répéter
ici), ce n'est pas des patrons qui parlent telle langue à la
place de patrons qui en parlent une autre : c'est plus de
patrons du tout !
La
« reconversion » néo-capitaliste est donc une énorme
tricherie. Elle veut amener les travailleurs à sacrifier leurs
intérêts immédiats et historiques, à accepter une part plus
réduite du gâteau, à s'incliner devant un accroissement de la
part des capitalistes, en échange de l'illusion d'une «
relance économique de la Wallonie ».
Nous
disons en échange d'une « reconversion » illusoire. Car il
faut bien comprendre les limites des « solutions » possibles
dans le cadre du régime capitaliste. Si le chômage continue à
diminuer en Flandre et à augmenter en Wallonie - aux dernières
nouvelles, il y a 46.000 chômeurs en Wallonie et 50.000 chômeurs
en Flandre, c'est-à-dire qu'avec moins d'un tiers de la
population active du pays, la Wallonie a le triste privilège de
compter 43% des chômeurs de Belgique ! - il y aura certes
quelques industries qui se créeront en Wallonie. Si les
subsides gouvernementaux augmentent, il en ira de même.
Si
les dirigeants syndicaux acceptent une politique capitaliste de
rationalisation, il y aura quelques fermetures d'entreprises en
moins. Mais d'abord, l'effet de ces « succès » de la «
re-conversion » sur l'emploi seront minimes. Le Front commun
F.G.T.B.-C.S.C., dans sa note du 2 mai 1969, reconnaît que les
25 milliards de francs investis en Wallonie au cours des deux
dernières années avec l'aide gouvernementale, ont créé en
tout et pour tout 18.000 emplois nouveaux, c'est-à-dire moins
qu'il n'en faut pour donner de l'emploi aux jeunes qui
apparaissent pour la première fois sur le marché du travail,
sans parler même de compenser les pertes courantes occasionnées
par les fermetures d'usines et rationalisations diverses.
Mieux,
certaines des mesures de « reconversion » (telle la «
rationalisation » de l'industrie sidérurgique) poursuivent le
but de réduire l'emploi et non de l'augmenter. Ensuite, toutes
ces mesures ne peuvent pas renverser fondamentalement la vapeur.
Car en économie capitaliste - orientée vers le profit - seule
une modification fondamentale du milieu wallon (accroissement
massif de la population ; fondation massive de plusieurs « pôles
de développement » réduction radicale des frais de transport;
création massive de nouvelles «industries de base ») rendrait
des investissements capitalistes privés sur large échelle plus
rentable en Wallonie qu'ailleurs dans le Marché Commun.
A
ce propos, il faut bien rappeler à l'ordre les dirigeants
syndicalistes liégeois et la « gauche respectueuse » du
P.S.B qui continuent à présenter le cas du Midi italien comme
un «exemple-pilote» de ce qu’une politique d'initiative
industrielle publique dans le cadre du régime capitaliste,
serait capable de réaliser. «Voyez le Midi italien, où la
reconversion (sous-entendu : néo-capitaliste) est un succès,
grâce aux holdings d'Etat », affirment-ils.
La
réalité est bien différente. Les holdings d'Etat Italiens,
tels IRI, l’ENI et autres, ont certes fondé plusieurs
complexes industriels importants dans le sud de l'Italie. La création
dune usine d'automobiles par Alfa Roméo y succède à l'aciérie
de Tarente et aux
divers complexes pétrochimiques. Mais le bilan de vingt années
de « reconversion industrielle » du Mezzogiorno italien,
du plan Vanoni aux initiatives de Holdings d’Etat est
lamentable : en 1968, emploi total a diminué de 177.000 unités
dans le Midi italien, comparé à l'année précédente. Pour la
période 1961-1967, l’emploi a diminué par exemple dans la région
de la Campania de 40.000 unités - des chiffres comparables
pourraient être cités pour d’autres provinces. L'explosion
de Battipaglia exprime le résultat social de cette faillite économique.
L’émigration
est plus que jamais la « solution » proposée par le
néo-capitalisme au problème du sous-développement économique.
On s'attend rien qu’à Turin à l’arrivée de 60 à 70.000
gens du Midi dans les deux années à venir. Il en ira de même
en Wallonie si les travailleurs se fient à la chimère de la «
reconversion » néo-capitaliste.
Le
moins qu'on puisse dire, c'est qu'il n'est pas très malin de
sacrifier la défense immédiate de l'emploi, la lutte pour les
salaires, la cohésion syndicale et la combativité des
travailleurs, sur
l’autel de cette chimère...
La
reconversion socialiste
Si
la « reconversion » néo-capitaliste n'est qu'un leurre, cela,
signifie-t-il que les travailleurs doivent se croiser les bras
et attendre passivement l'effondrement final de l'économie
wallonne (dans l’espoir que cela provoquera la « révolution
» ajouteront quelques «gauchistes» confus) ? II ne peut en être
question. Une classe laborieuse qui serait incapable de défendre
ses intérêts immédiats serait évidemment encore mains
capable de « faire la révolution » et de renverser le règne
du Capital.
Ce
qui importe, c'est de mettre au point un programme de
revendications qui correspondent aux aspirations réelles des
travailleurs, lorsque ceux-ci parlent de « reconversion ». Ces
revendications, souvent précisées, seraient notamment les
suivantes :
- Introduction
immédiate des 40 heures et de la pension à 60 ans ;
- Contrôle
ouvrier - c'est-à-dire pouvoir de veto ouvrier - sur les
fermetures d'usines et les licenciements ;
- Paiement
par le patronat en bloc (et non par la collectivité) des
salaires des travailleurs qui ne seraient plus rémunérés
par suite de fermetures d’usines ;
- Nationalisation
de la grande industrie (sidérurgie chimie, raffinerie de pétrole
et tous les secteurs de l’énergie, fabrications métalliques)
et sa gestion sous contrôle ouvrier, dans un cadre fédéral;
- Nationalisation
des banques, des compagnies d'assurances, des holdings et de
toutes les institutions de crédit, afin de dégager les
capitaux nécessaires à une véritable reconversion, sur
grande échelle, de l'industrie wallonne, sous la forme de
création d'entreprises propriété collective gérées sous
contrôle ouvrier, dans un cadre fédéral;
- Elaboration
d'un plan populaire de développement économique de la
Wallonie, axé sur la satisfaction des besoins prioritaires
de la population et sur la base duquel seraient créées les
nouvelles entreprises.
L'agitation
sur les idées essentielles de ce programme de revendications
transitoires - de réformes de structure anticapitalistes -
devrait dégager progressivement une combativité ouvrière
croissante, comme pendant la période 1956-1960. Cette
combativité pourra déboucher, à travers des mobilisations et
des grèves partielles, sur une grève générale du type de
celle de décembre 1960 - janvier 1961.
Mais
grâce à la création de comités de grève et a la formation
d'une avant-garde ouvrière plus critique et plus expérimentée,
qui a tiré les leçons de l’échec de 1960-61, cette grève générale
se terminerait bien différemment de celle de décembre 1960.
Il
n y a pas d'autre voie de salut pour les travailleurs wallons
que cette voie-là. Et sur le chemin qui conduit vers ces
objectifs, ils devront chercher et trouver des alliés de plus
en plus nombreux non chez les capitalistes wallons, mais chez
leurs frères de classe flamands et bruxellois.
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