L'ampleur des manifestations estudiantines
provoquées par la volonté de l'administration de «Louvain
francophone » d'assurer le maintien de cette section de
l'Université catholique dans la ville flamande de Louvain, a
surpris tous les observateurs, malgré les avertissements de
1966. La première constatation doit partir précisément de
l'ampleur des manifestations. Il serait indigne de tout
démocrate, sans parler d'un socialiste ou même d'un marxiste,
d'expliquer ces cortèges quotidiens s'étendant progressivement à
toutes les villes flamandes par l'influence prépondérante «
d'agitateurs » ou de «chefs d'orchestre occultes». Il s'agit
manifestement d'un phénomène social, qui doit avoir des causes
sociales.
La radicalisation des étudiants est un
phénomène qui devient de plus en plus universel. Qu'on se
rappelle les puissantes manifestations du Zengakuren japonais en
1960, le free speech movement de Berkeley (Californie) aux
Etats-Unis, la montée du mouvement anti-guerre parmi les
étudiants américains, les actions radicales des étudiants en
Allemagne occidentale, l'agitation en faveur du «pouvoir noir»
déclenchée par les étudiants noirs aux U.S.A, les grandes
manifestations contre le plan Fouchet des étudiants français,
les récentes occupations de plusieurs universités italiennes par
les étudiants, dont l'Université catholique de Milan, la révolte
dos étudiants de Madrid et de diverses universités espagnoles,
le mouvement provo à Amsterdam, la révolte des jeunes de Brême
il y a quinze jours, etc., etc. Il est clair que l'explosion des
étudiants flamands n'est pas un phénomène isolé et que, malgré
ses particularités, elle reproduit dans notre pays une tendance
qui se manifeste dans presque tous les pays du monde.
« L'EXPLOSION UNIVERSITAIRE »
Dans les pays industriellement développés,
les racines objectives de cette radicalisation doivent être
mises en lumière. Il faut partir de «l'explosion universitaire»,
qui a considérablement accru le nombre d'étudiants de
l'enseignement supérieur, ce qui correspond d'ailleurs à des
besoins objectifs du mode de production capitaliste, à son étape
présente de développement. Mais en fonction du développement
inégal entre la «consommation privée» et la «consommation
collective» (c'est-à-dire l'insuffisance des crédits alloués à
l'enseignement supérieur), l'accroissement du nombre des
étudiants a été à la base d'une crise presque permanente de
l'université bourgeoise. Ni l'infrastructure matérielle de
l'université (locaux, maisons et restaurants d'étudiants,
bibliothèques, instruments de recherche, etc.), ni la structure
de l'enseignement, ni la qualification du personnel
universitaire, ni surtout la structure organisationnelle de
l'université n'ont évolué en fonction des besoins résultant de
cette « explosion universitaire ».
Bref, une certaine démocratisation de l'accès
aux études s’est faite dans le cadre d'une université qui, elle,
n'est pas démocratisée, et qui devient une « machine à diplômés
». Or, cette explosion a profondément modifié le recrutement
social des étudiants. Alors que l'université était, dans le
passé, presque exclusivement accessible aux fils de la grande
bourgeoisie et des cadres supérieurs, l'augmentation du nombre
des étudiants y a introduit, sinon un pourcentage majeur de fils
de la classe ouvrière (ceux-ci restent victimes d'une
discrimination résultant de la structure non démocratique de
l'ensemble du système d'enseignement, à partir de l'école
primaire), du moins un nombre considérable de fils et filles de
la petite-bourgeoisie, des employés et des couches inférieures
de fonctionnaires. Souvent, il s'agit d'étudiants qui, de par
leur milieu d'origine, sont plus près des travailleurs que de la
grande bourgeoisie. Souvent aussi, il s'agit d'étudiants qui
sont confrontés avec des problèmes matériels quotidiens ignorés
jadis par la masse estudiantine d'origine riche. De ce fait, la
crise permanente de l'université bourgeoise aboutit
nécessairement à une remise en question croissante de cette
université et de la société bourgeoise dans son ensemble par une
minorité importante d'étudiants politisés.
LES ETAPES D'UNE REMISE EN QUESTION
Les étapes de cette remise en question sont
bien connues, et Louvain flamand, où le nombre d'étudiants
d'origine modeste est plus élevé que dans n'importe quelle autre
université belge, en a fourni un exemple véritablement classique
depuis quelques années :
1° Naissance du syndicalisme estudiantin à
des fins purement matérielles (restaurants universitaires,
coopératives de logement, grève contre les prix excessifs des
repas) ;
2° Remise en question de la structure
autoritaire de l'administration de l'Université, sur toutes les
questions concernant le bien-être immédiat des étudiants;
3° Remise en question de cette même autorité
en matière de politique universitaire (la décision de maintenir
« Louvain francophone » a été prise en dépit de l'opinion de la
majorité des étudiants et sans même consulter ceux-ci) ;
4° Naissance d'un sentiment de révolte à
l'égard de toutes les structures autoritaires (celle de
l'Université, de l'épiscopat, de l'Etat bourgeois, du grand
capital); C'est alors que naît le S.V.B. (Studenten Vakbeweging)
dans le courant de 1967.
5° Elargissement de la prise de conscience
grâce à une sensibilité plus nette à l'égard des grands
problèmes internationaux (Vietnam, Cuba, guérillas d'Amérique
latine). Il faut souligner le fait que des étudiants de sciences
sociales peuvent plus facilement obtenir une vue globale de
l'évolution sociale que des travailleurs manuels ou
intellectuels, victimes de la division du travail et rivés à des
tâches parcellaires qui tendent de les couper d'une vue
d'ensemble du monde. Aussi n'est-ce pas par hasard que, tant sur
la question du Vietnam que sur Che Guevara, l'Université de
Louvain a connu des meetings plus larges et d'un esprit plus
militant que n'importe quelle autre ville de Belgique. Il faut y
ajouter que le souvenir du R.P. Camilo Torres, ancien étudiant
de Louvain, tombé en héros à la tête de guérillas en Colombie, y
contribue également;
6° Tentative délibérée d'intégrer cette
révolte contre les structures autoritaires et contre
l'hypocrisie et le cynisme qui prévalent dans la société
bourgeoise et dans les partis traditionnels dans une critique
d'ensemble de la société néo-capitaliste;
7° Efforts de traduire dans les faits cette
tentative d'orientation anticapitaliste (puissamment stimulée
par les, incidents de Zwartberg) en prenant contact avec les
travailleurs d'avant-garde, ce qui s'est soldé par l'effort des
étudiants de Louvain d'aider les ouvriers des usines A.B.R. de
Louvain d'occuper leur usine lorsque la Société Générale a
annoncé leur fermeture.
UNE PARTICULARITE...
Sur cette évolution qui ne fait que
reproduire en Belgique ce qui s'est passé dans maints autres
pays se greffe évidemment une particularité: le conflit des
nationalités dans notre pays et les antécédents politiques et
idéologiques du mouvement estudiantin à Louvain. Sa tradition
est nettement nationaliste petite-bourgeoise. Comme partout en
Flandre, ce nationalisme avait été à prédominance démocratique
et socialisant dans la période 1918-29, a été largement
influencé sinon accaparé par des forces fascistes dans la
période 1930-44, et a connu un examen de conscience et un
réalignement généralisé au lendemain de la deuxième guerre
mondiale, processus qui est loin d'être terminé. Autant il
serait erroné de présenter la masse des étudiants politisés de
Louvain comme des «racistes» ou des «xénophobes», sinon comme
des «semi-fascistes», autant il serait déplacé d'ignorer que des
influences réactionnaires s'exercent encore sur cette masse.
DECLERICALISATION
En fait, l'évolution de cette masse peut être
résumée par la formule de décléricalisation. Le choc émotionnel
provoqué par le refus de l'épiscopat de respecter à Louvain la
volonté de l'immense majorité du peuple flamand de maintenir le
caractère homogène, du point de vue linguistique, de
l'enseignement en Flandre, a fait fondre comme neige au soleil
l'influence politique du P.S.C. et du haut clergé parmi le corps
estudiantin de Louvain. Ainsi s'est créé un grand vide, où deux
forces luttent pour le moment pour conquérir l'influence
pré-dominante:
— les forces de la Volksunie, qui se
cramponnent à un nationalisme d'essence culturelle et
linguistique, caractérisé par le cri «Walen buiten» (les Wallons
dehors), qui recherchent une alliance exclusivement dans la
petite-bourgeoisie et la bourgeoisie moyenne flamande, et qui
représentent l'arrière-garde du mouvement, le poids du passé sur
le présent.
— les forces des syndicats estudiantins, qui
cherchent à étendre la révolte estudiantine vers la même prise
de conscience anticapitaliste qu'ils ont eux-mêmes vécue il y a
quelques années, qui essayent de substituer au cri « Walen
buiten » le cri « bourgeois buiten », qui recherchent
délibérément l'alliance avec les syndicats ouvriers et les
milieux de travailleurs d'avant-garde, tant en Flandre qu'en
Wallonie et à Bruxelles, et qui représentent manifestement
l'avant-garde du mouvement, l'annonce de l'avenir déjà en
marche.
En comprenant qu'il s'agit d'une lutte au
sein d'une masse estudiantine qui, demain, influencera
profondément toutes les organisations de masse flamandes, on
comprend l'importance pour le mouvement ouvrier d'une attitude
qui n'aboutit ni à l'abstentionnisme, ni à la diversion, mais
qui jette son poids dans la balance pour permettre aux forces
flamandes progressistes d'arracher de manière durable la
direction du mouvement flamand aux forces de droite.
On peut dire qu'on se trouve devant une
responsabilité véritablement historique, car c'est la rupture
entre le mouvement ouvrier et le mouvement flamand, pourtant
d'origine et de portée essentiellement démocratique et sociale,
qui a largement empêché dans ce pays, pendant plus d’un
demi-siècle, la percée de l'extrême-gauche et du socialisme. Il
y a aujourd'hui une occasion qui peut permettre de surmonter
cette rupture. Ceux qui refusent de le faire ou qui empêchent
de marcher dans cette voie prennent la responsabilité d'une
nouvelle phase de paralysie de fait des forces de gauche.
Pareille orientation correspond aux principes
doctrinaux défendus par la, C.S.T. et acceptés, du moins en
partie, par une fraction importante de la gauche.
LOUVAIN ET LE DROIT DES PEUPLES
La demande du transfert en Wallonie de la
section francophone de l'Université de Louvain correspond aux
exigences du droit démocratique des peuples à disposer librement
d'eux-mêmes, et reflète les impératifs du fédéralisme, réclamé à
la fois par le peuple wallon et par le peuple fla-mand. Elle est
donc conforme à nos principes. Mieux: refuser ce transfert,
c'est jeter le doute sur la sincérité des professions de foi
fédéralistes, c'est renforcer le soupçon que les francophones de
ce pays réclameraient à la fois le fédéralisme pour échapper à
leur minorisation au sein de l'Etat unitaire et le droit de
continuer à grignoter le caractère homogène, du point de vue
culturel et linguistique, de la Flandre, c'est-à-dire
réclameraient à la fois l’auto-gouvernement pour la Wallonie et
le refus d'auto-gouvernement pour la Flandre.
Il est évident que si le mouvement wallon
devait par malheur adopter pareille position, la lutte pour le
fédéralisme serait irrémédiablement condamnée à l'échec. S'il
devait par contre comprendre l'utilité d'élargir toutes les
brèches qui apparaissent dans les structures de l'Etat unitaire
bourgeois, il préparerait la nécessaire et inévitable confluence
des forces populaires wallonnes et flamandes, qui jetteraient
bas et l'Etat unitaire et le capitalisme en Belgique.
******
Il est grand temps de prendre la mesure
exacte du mouvement flamand et de la révolte de Louvain. C'est
une nécessité vitale pour le mouvement ouvrier belge; la
désunion entre ces deux mouvements a empêché depuis un
demi-siècle toute percée de l'extrême-gauche socialiste.
Pour comprendre la révolte de Louvain, il
faut partir, en premier lieu, de la radicalisation des
étudiants, phénomène universel qui se manifeste aux U.S.A. comme
au Japon, à Berlin à Milan comme à Madrid. Les étudiants de
l'enseignement supérieur sont aujourd'hui en grande partie
d'origine petite bourgeoise et ils ressentent, à plus d'un
titre, et plus vivement peut-être qu'aucune catégorie sociale,
l'oppression particulière du système néo-capitaliste inscrite
dans les structures de l'université.
D'autre part, cette jeunesse instruite prend
conscience des grands problèmes internationaux de l'heure, le
Vietnam, Cuba, l'Amérique latine. Pour comprendre la révolte de
Louvain il faut partir, en second lieu, du mouvement
d'émancipation du peuple flamand, enfermé jusqu'ici dans un
stérile conflit de nationalités.
D'origine démocratique, le mouvement flamand
est en train de franchir le cap de la décléricalisation et de la
prise de conscience anticapitaliste. Il faut donc que tous les
ouvriers du pays, flamands et wallons, jettent leur poids dans
la balance pour permettre aux forces flamandes progressistes
d'arracher, de manière durable, la direction du mouvement
flamand aux forces de droite.
Cette orientation correspond profondément aux
principes doctrinaux défendus par la C.S.T. La demande du
transfert en Wallonie de la section francophone de l'Université
de Louvain est un pas décisif vers le fédéralisme qui jettera à
bas l’Etat unitaire et le capitalisme en Belgique.
Nous poursuivons ici la publication de
l'étude dont la première partie a paru dans le numéro précédent
de « La Gauche ».
Qu’il s’agisse vraiment d’un test de
sincérité des convictions fédéralistes, voilà ce qui se confirme
à la lumière du fait que toutes les formations politiques
flamandes, y compris les socialistes flamands lors de leur
récent congrès de Klemskerke, y compris le Liberaal Vlaams
Verbond, pourtant des plus modérés, se rallient à la thèse de
« Louvain Flamand ». On peut difficilement contester dans ces
conditions qu’ils s’agisse d’une revendication émanant de toute
la nationalité flamande et qu’on piétine dès lors les droits des
nationalités en refusant d’acquiescer à cette revendication.
TROIS ARGUMENTS ONT ETE OPPOSES A CE
RAISONNEMENT
Le premier, émanant des mouvements
fédéralistes wallons, part de la constatation qu’il y a tout un
contentieux flamando-wallon; que dans ce contentieux on ne peut
isoler un facteur et que si l'on donne satisfaction aux Flamands
sur la question de Louvain on affaiblit d'autant la position des
négociateurs wallons lors de la discussion de ce contentieux
d'ensemble. C'est un point de vue de marchandage politique, qui
tourne délibérément le dos aux principes.
Comment les mouvements wallons pourraient-ils
réclamer l'application du, principe des nationalités et de l'auto-détermination
aux Fourons; comment les Bruxellois pourraient-ils réclamer le
droit d'autodétermination pour l'agglomération bruxelloise, en
refusant en même temps l'application du même principe au peuple
flamand et aux étudiants de Louvain? C'est d'ailleurs un point
de vue de marchandage politique inefficace, car il place les
mouvements wallons, d'essence populaire et progressiste, en
porte-à-faux, en alliance avec les pires formes réactionnaires
et cléricales, bouchant ainsi l'avenir d'une unité d'action des
travailleurs wallons et flamands.
Le deuxième, émanant des défenseurs de
l'école officielle, exprime la crainte que le transfert de «
Louvain-francophone » en partie en Wallonie et en partie à
Bruxelles (plan en voie de réalisation avec la Faculté de
médecine à Woluwé), n'aboutisse en définitive à renforcer le
réseau d'enseignement catholique, aux dépens de l'enseignement
officiel. Certains vont même jusqu'à voir dans toute « l'affaire
de Louvain » une machination diabolique de l'épiscopat pour
arracher les subsides nécessaires au financement d'une nouvelle
université catholique, qui modifierait à la longue les rapports
de forces idéologiques et politiques en Wallonie. Un tel
raisonnement est fréquent dans les milieux P.S.B. flamands qui,
par peur de se prononcer, présentent Louvain comme une «
diversion », une nouvelle guerre scolaire.
A ceux-là il faut répondre franchement que
comme Paris, le fédéralisme vaut bien une messe: André Renard
lui-même avait promis une université catholique aux Wallons
croyants, dans le cadre d'une Belgique fédérale ; que l'Eglise
de 1968 n'est plus l'Eglise de 1848 ou de 1893, et certainement
pas l'ennemi n°1 du mouvement ouvrier de ce pays et que ce sera
aux croyants francophones eux-mêmes à débattre de la nature de
l'Université de Namur, qui pourrait fort bien devenir une
université pluraliste en échange de la création d'une nouvelle
université pluraliste à Anvers. En tout cas, il est évident que
donner la priorité à ce genre de conflit sur la possibilité de
faire basculer une partie de l'intelligentsia flamande du côté
de la gauche serait commettre une erreur politique
impardonnable.
Il est d'ailleurs devenu très clair que c'est
pour des raisons profondes que le clergé et la bourgeoisie
tentent systématiquement de déformer la portée de la lutte des
étudiants flamands. L'implantation de l'université francophone
en Wallonie intégrerait celle-ci plus étroitement parmi la
population et accélérerait également le processus de
démocratisation de cette partie de l'université catholique.
D'autre part, cette implantation représenterait un éclatement
des structures unitaire et faciliterait grandement
l'instauration du fédéralisme.
«TOLERANCE» OU EGALITE?
Le troisième argument, émanant des milieux
libéralisants et sociaux-démocrates de Bruxelles, met en avant
la défense de la liberté individuelle, et voit dans l'exigence
d'une université homogène flamande à Louvain un relent de
racisme réactionnaire devant lequel il ne faut abdiquer à aucun
prix. Ces mêmes milieux s'étaient d'ailleurs déjà opposés avec
le même argument contre la création d'une université flamande à
Gand, il y a quarante ans. Il suffirait de demander à ces
messieurs la réciproque (c'est-à-dire la création d'une
université flamande à Liège ou à Charleroi), pour s'apercevoir
où se trouve le véritable nationalisme; car il est manifeste
qu'ils réclament pour eux-mêmes des droits qu'ils se refusent
avec obstination d'accorder à d'autres, partant de la notion
purement raciste de «supériorité» de la culture française sur la
culture néerlandaise.
En réalité, ce qui est en jeu, ce n'est pas
le principe de tolérance, pas plus qu'il n'est en jeu dans
n'importe quel pays au monde où des nationalités jadis opprimées
réclament la plénitude de leurs droits, mais le principe
d'égalité. La tolérance ne peut être pratiquée qu'entre égaux. A
l'époque de la colonisation, réclamer une extension de
l'enseignement français en Algérie n'était pas faire preuve de
tolérance, mais défendre des structures iniques et inégales. Une
fois l'indépendance acquise, la tolérance (et même l'extension)
de l'enseignement français a pu être négociée (autre chose est
de savoir si cette négociation a été entièrement acquise vu les
liens de dépendance néo-coloniale qui lient l'Algérie actuelle à
la France).
Le devoir des forces de gauche est donc
clair. Elles doivent appuyer l'avant-garde progressiste des
étudiants de Louvain, les aider à donner une orientation
fédéraliste anticapitaliste à leur lutte, contribuer à
l'établissement d'une alliance durable entre eux et
l'avant-garde du mouvement ouvrier, en don-nant un appui à la
revendication «Louvain francophone en Wallonie».
Elles doivent également dénoncer les
brutalités de la gendarmerie, la nuisance des lois dites «du
maintien de l'ordre » et le caractère profondément
antidémocratique de l'Etat bourgeois, dès que les masses se
mettent à agir.
Elles doivent ensuite amplifier la prise de
conscience démocratique, anti-autoritaire et anticapitaliste des
étudiants de Louvain en élaborant avec eux un programme cohérent
de revendications portant sur la nature de l'université,
programme qui ne débouche pas seulement sur l'idée de
pré-salaire, mais encore sur celle d'une participation directe,
avec droit de veto, de représentants élus des étudiants à
l'administration des universités. |